Ça y est. Vous tenez votre idée de roman.
Vous avez noté des idées sur vos personnages, votre décor, votre intrigue. Encore mieux, vous avez commencé à noircir quelques pages.
Oui, mais…
Un horrible soupçon germe dans votre esprit.
Votre idée est-elle bonne ? Mérite-t-elle que vous y consacriez des mois, voire des années ?
Parce qu’on ne va pas se mentir : écrire un roman, c’est passionnant, mais c’est un sacré investissement.
Et avec tout ce que vous avez déjà à faire, votre temps est précieux !
Sans compter que la concurrence est très forte. Et vous voulez que votre livre se démarque, tel l’Empire State Building dans le ciel de New-York.
Larry Brooks, auteur américain de best-sellers, s’est justement penché sur le sujet qui nous intéresse. Il en a même tiré un livre : Great Stories Don’t Write Themselves [en français : Les bonnes histoires ne s’écrivent pas toutes seules.]
Je partage avec vous ses théories pour donner à votre idée de roman tout le potentiel qu’elle mérite !
1 – La question à vous poser sur votre idée de roman
Est-ce que votre idée d’histoire est assez forte ?
Dit autrement : est-ce qu’un public est prêt à recevoir votre idée ? Larry Brooks explique que, dans 96% des manuscrits rejetés par les éditeurs, il n’y a pas que des débutants.
Il y a aussi beaucoup de gens qui n’apprennent pas de leurs erreurs. Des gens qui écrivent ce qui leur plaît sans se demander si ça va plaire à quelqu’un d’autre.
Et alors ? Marre des diktats des éditeurs, vous allez me dire. Avec l’autoédition, publier n’a jamais été aussi facile !
Vous avez raison. Mais ça ne suffit pas.
Pourquoi ?
Parce que votre défi numéro 1 en tant qu’auteur, ce n’est plus de publier.
C’est de trouver votre audience.
Vos lecteurs.
Est-ce que mon histoire est intéressante pour mes lecteurs ? C’est LA question que tout auteur doit garder en tête tout au long de son processus d’écriture.
Si vous ne pensez pas à vos lecteurs, ils le sentiront. Et il y a de grandes chances pour qu’ils ne se sentent pas concernés par votre histoire.
Mais ça ne vous arrivera pas.
Car je vous dévoile immédiatement les ingrédients essentiels d’une bonne idée de roman😊
2 – Les 4 piliers d’une idée de roman suffisamment puissante
Les ingrédients essentiels :
- L’intensité dramatique : sans conflits, pas d’histoire ! Assurez-vous que votre personnage principal poursuit un objectif auquel s’oppose quelque chose ou quelqu’un, aussi connu sous le nom d’antagoniste. Souvenez-vous, c’est la règle de base. L’histoire ne doit pas être purement descriptive ou documentaire, du genre « les dernières vacances de mon héros à la plage » : effet soporifique garanti !
- Votre personnage principal : je dis souvent que vous devez le connaître comme si vous étiez son psy. Mieux, même ! Qui est-il et comment va-t-il réagir ? Creusez ça à fond avant de vous lancer.
- Votre thématique et sa résonance émotionnelle : est-ce que le thème de votre histoire est assez puissant pour résonner chez d’autres personnes que vous ? En quoi peut-il intéresser votre public ? Votre idée de roman doit créer une implication émotionnelle forte chez votre lecteur. Il doit mourir d’envie de découvrir ce qui va se passer. Plus de détails sur cette question fondamentale dans quelques instants !
- Votre structure et votre narration : comment allez-vous déplier votre histoire de la manière la plus percutante pour votre lecteur ? Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous invite à lire mon article « 6 techniques pour captiver ses lecteurs »
3 – Une idée de roman qui sort du lot : la force du concept
Pour que votre idée de roman se démarque, Larry Brooks recommande de trouver un concept.
Le concept est le cadre général dans lequel votre intrigue et vos personnages vont évoluer.
Quelque chose qui va leur donner une saveur unique. Et marquer profondément l’esprit de vos lecteurs.
Un exemple du côté des super-héros :
Mettons que votre idée est de raconter l’histoire d’un garçon super doué qui décide de s’attaquer au mal dans sa petite ville. Il y réussit et se met en devoir de sauver le monde.
Comment raconter cette histoire d’une manière unique ? D’une façon que personne n’a encore jamais utilisée ?
Et si votre héros était arrivé sur Terre dans le crash de sa navette spatiale ? Il en aurait miraculeusement réchappé, et aurait été adopté par un couple de braves gens du Kansas.
Ils l’élèvent comme leur propre enfant, lui apprennent à distinguer le bien du mal. Et puis ils se rendent compte qu’il possède des capacités surhumaines, des super pouvoirs.
Sa mère lui confectionne un costume. Plus tard, il découvre que sa mission est de protéger les humains sans jamais révéler sa véritable identité ni modifier le cours de l’histoire
Bien sûr, vous m’avez vue venir. Ce garçon, c’est Superman. Le super-héros de bandes dessinées le plus vendu de tous les temps.
Et c’est ce background, ce contexte extraordinaire qui a créé le concept à l’origine de son succès.
Et si je ne n’écris pas d’histoire de super-héros ?
Vous pouvez inventez des concepts dans tous les genres d’histoires. Par exemple :
- Dans un roman policier : Stephanie Plum, l’héroïne de la série policière de Janet Evanovitch, est un excellent exemple. Après avoir perdu son emploi comme acheteuse de lingerie fine, Stephanie doit s’improviser chasseuse de primes pour remplir son réfrigérateur. Le caractère haut en couleur du personnage y est pour beaucoup dans l’énorme succès de la série. Notez au passage comme on est loin du cliché de l’enquêteur dépressif et alcoolique 😊
- Dans une histoire d’amour. Imaginez que vos deux amoureux soient des membres du staff du Président des États-Unis. Ils tombent amoureux sous les yeux de la Nation. Dans un contexte où les relations amoureuses à la Maison Blanche sont strictement encadrées, voire carrément interdites. Vous avez un concept.
Maintenant que vous voyez ce qu’est le concept, passons au test des 8 critères.
4 – Votre idée de roman et le test des 8 critères
Selon Larry Brooks, une histoire ne fonctionne pas si un de ces 8 critères manque ou n’est pas assez travaillé :
1) Le lecteur rencontre votre personnage avant que le ciel ne lui tombe sur la tête.
Donnez à voir le quotidien de votre héros, son univers avant qu’il ne soit bouleversé par le conflit ou la difficulté qu’il devra résoudre.
2) Quelque chose bouleverse l’univers de votre héros.
C’est le fameux élément déclencheur, le ciel qui tombe sur la tête. Son enfant est kidnappé, son conjoint le quitte, il perd son travail…
3) Votre personnage doit réagir.
Votre héros devra fuir pour sauver sa vie, sauver quelqu’un rapidement, trouver une information essentielle, faire face à un ennemi menaçant…
Car ce qui nous passionne dans les histoires, finalement, c’est l’humain. Les ressorts psychologiques des êtres. Comment un personnage dont l’existence est brutalement bouleversée va-t-il réagir ?
4) Les enjeux doivent être cruciaux et susceptibles de toucher une large audience.
Votre héros risque sa vie, ou il risque de perdre quelque chose ou quelqu’un de fondamental pour son bien-être.
Le lecteur doit ressentir le poids, l’importance de ces enjeux. C’est cela qui va l’impliquer émotionnellement et lui faire ressentir de l’empathie. Votre lecteur doit se faire un sang d’encre pour votre personnage et se passionner pour son combat.
5) Quelque chose ou quelqu’un (un « méchant » par exemple) s’oppose à la réalisation de la quête de votre héros.
Du conflit, toujours du conflit ! Maltraitez vos personnages au maximum 😊 La quête de votre héros ne doit pas être une promenade de santé !
6) La tension dramatique de votre histoire monte progressivement.
La narration est suffisamment rythmée pour tenir le lecteur en haleine. Elle alterne des hauts, des bas, des moments de répits, des moments très intenses.
7) Votre héros doit évoluer.
Le personnage principal doit apprendre, se confronter à ses peurs et démons intérieurs. Il ne parvient pas tout de suite à ses fins. Au contraire, il doit d’abord échouer avant d’apprendre, persévérer et vaincre.
8) Votre héros doit être le catalyseur dans la résolution de l’histoire.
Il n’est pas un observateur passif. La solution doit venir de lui.
Vous avez repris votre idée de roman et l’avez passée à la moulinette de ces critères ? Bravo, vous êtes sur la bonne voie !
Mais restez encore un peu avec moi.
Pourquoi ? Parce que vous allez à présent découvrir comment créer une véritable connexion avec votre lecteur.
5 – Le pouvoir de la résonance émotionnelle
Hunger games
Une histoire fonctionne quand le héros est confronté à quelque chose que le lecteur peut ressentir profondément.
Car on touche ici à la dimension universelle d’une histoire. Sa capacité à dépasser les problématiques personnelles de son auteur et à parler au plus grand nombre.
Exemples :
- Le combat de Batman pour empêcher des méchants d’empoisonner les réserves d’eau d’une ville et tuer tous les enfants. Tout le monde n’accroche pas forcément aux super-héros. N’empêche que toute personne normalement constituée peut ressentir l’urgence, la justesse de cette mission. Un danger de mort est en général un moyen puissant d’impliquer vos lecteurs.
- On peut aussi imaginer un docteur qui aurait trouvé un traitement permettant de lutter contre une pandémie épouvantable. Mais personne ne veut l’écouter et de grosses compagnies pharmaceutiques se dressent en travers de sa route… C’est un combat qui nous touche profondément.
- La résonance émotionnelle s’appuie sur les sentiments et émotions les plus essentiels de la condition humaine : l’amitié, la solidarité, le sens du sacrifice, la résistance à l’oppression et au totalitarisme… Pensez à Harry Potter ou Hunger Games ! Ces thèmes y sont très présents.
- L’amour, enfin, crée une résonance émotionnelle forte, surtout s’il est contrarié. Trouver le véritable amour, vivre une histoire d’amour inconditionnelle, est peut-être l’aspiration humaine la plus profonde.
En conclusion, j’ai trouvé les théories de cet auteur très intéressantes. Surtout le test des 8 critères et la résonance émotionnelle.
Le concept, c’est la cerise sur le gâteau 😊
Mais ne vous prenez pas la tête à en trouver un absolument, beaucoup de bonnes histoires n’en ont pas forcément et ça ne les empêche pas de fonctionner.
J’espère que cet article vous sera utile pour tester votre idée de roman et la rendre plus solide !
Photo de couverture : Empire State Building
5 commentaires
Ah, si Stendhal avait lu tes conseils, Garance, lui qui écrivait pour les et pensait n’être lu que 50 ans plus tard!
Tu donnes d’excellents conseils, Garance! Et tu soulèves un problème, qui est celui de tout artiste: certes, un artiste, quel qu’il soit, envisage forcément sa réception par un public. Mais il obéit aussi à une nécessité intérieure, impérieuse: d’où parfois un conflit. A trop penser à son audience, ne risque-t-il pas de se trahir lui-même, en prostituant son talent? Et s’il ne veut pas se trahir, ce peut-être au risque de déplaire. Ainsi Stendhal eut peu de succès : il s’adressait aux qui sauraient l’apprécier 50 ans plus tard. Proust a été éreinté lorsqu’il a fait paraître les 1ers volumes de la Recherche. Gogol, dans les Nouvelles de St-Pétersbourg, raconte l’histoire d’un peintre qui perd son génie à force de chercher un succès facile, en peignant ce qui plaît à son public. Certains romans à succès appliquent des recettes éprouvées, exploitent les goûts du public visé, font sciemment de la littérature . Attention! Je ne dis pas qu’un ouvrage qui a du succès tout de suite est sans valeur!!
Et quand nous parleras-tu de l’écriture elle-même, du style, quoi?
Continue ce blog, Garance, il est très intéressant!
Merci Martine pour ce commentaire très riche et pour vos encouragements ! C’est vrai : en tant qu’auteur, il ne faut pas trahir son âme, sa personnalité artistique pour vouloir plaire à tout prix. D’ailleurs, on ne pourra jamais plaire à tout le monde, par principe. Mais je pense quand-même qu’on peut conserver son âme et son originalité tout en pensant à son lecteur, et à la manière la plus plaisante, la plus captivante, de lui raconter notre histoire. C’est tout le côté artisanal de l’écriture, somme toute, ce que nos amis anglo-saxons appellent le storytelling.
On parlera du style dans de prochains posts, le monde de l’écriture est si vaste et si passionnant 🙂
Belle soirée à vous,
Garance
Je veux décrire l’histoire tragique d’un jeune garçon et de sa jeune soeur.
Bonjour Séverin,
Voilà un thème qui peut certainement créer de l’empathie chez vos lecteurs, en faisant appel à des sentiments et émotions universels.
Je vous souhaite une belle écriture.
Garance